Oser dire non

En route pour la nouvelle famille avec laquelle je travaille cette semaine. Je quitte ma campagne avec ses routes étroites dans les champs et je vois de plus en plus d’immeubles et de routes. On arrive à un rond-point et je vois deux énormes centres commerciaux. Je me dis : c’est pratique d’habiter ici, pas besoin de faire beaucoup de route pour faire les courses (moi, ça me prend 15 minutes pour aller à une grande surface). Mais pourquoi deux, l’un à côté de l’autre ? Mon GPS dit que je suis presque arrivée, la famille habite vraiment tout près des centres commerciaux !

J’arrive chez la famille et peu après, on joue avec les magnets, le jeu favori de tous les enfants (lien). J’instruis les parents d’attendre à chaque fois la prise d’initiative de leur enfant, avant d’ajouter eux-mêmes une pièce à la construction d’une tour. Ainsi, je veux renforcer les initiatives adaptées de cet enfant et aussi lui apprendre qu’il doit fournir des efforts pour construire quelque chose (et non pas qu’on fasse à sa place par peur qu’il s’en aille). Bien évidemment, il s’en va, c’est un enfant qui bouge beaucoup et qui va dans tous les sens, et je dis à sa mère de ranger calmement les pièces de la tour. La mère commence à ranger et l’enfant revient. Il prend une pièce et continue à construire, sa mère aussi. Ceci se répète et finalement, ils jouent longtemps ensemble, environ 20 minutes, plus longtemps que d’habitude, quand la mère le ramenait et construisait pour l’attirer.

Après ce jeu, il déambule dans tous les sens dans la maison et j’en profite pour discuter avec les parents. Je leur demande ce qu’ils souhaitent travailler cette semaine.

— « On souhaite faire les courses avec lui, on n’arrive plus à l’emmener, car à chaque fois qu’on l’emmène, il insiste pour acheter encore un appareil photo. »

Je leur demande plus de précisions et c’est là que j’apprends l’existence de Kidizoom. Leur enfant voit sur YouTube les nouvelles versions avec de nouveaux jeux dedans, et ensuite il veut acheter cette version (car il y a d’autres jeux dedans). Le problème, c’est qu’au cours de 3 mois, ils en ont acheté 6, ainsi qu’un « ordinateur portable » et des téléphones de la même marque. Les parents n’arrivent pas à ne pas lui acheter, car il fait une crise gigantesque s’ils ne l’achètent pas. Son père me dit :

— « Avant, c’était des bonbons, puis c’était des jouets, maintenant c’est de l’informatique… ça commence à être compliqué… »

Je me dis que c’est quand même incroyable qu’ils habitent à côté de deux énormes centres commerciaux… Ce n’est pas une chance, c’est l’enfer en fait.

Évidemment, je vois des crises à chaque fois qu’on lui dit non, et c’est ce qu’on travaille cette semaine-là. Il ne veut pas non plus marcher tranquillement à côté de sa mère, chose qu’on travaille également. Je ne l’emmène pas faire les courses, je veux d’abord qu’il accepte le non dans la maison et qu’il marche tranquillement à côté de sa mère ailleurs que dans un centre commercial. Mais on fait énormément de progrès dans la semaine, grâce à ses parents qui appliquent tout ce que je leur dis à la lettre. Mais on fait énormément de progrès dans la semaine, grâce à ses parents qui appliquent tout ce que je leur dis à la lettre. Ils ont réduit le temps d’iPad, ils ont fait les exercices, et leur enfant progresse chaque jour. Nous travaillons non seulement sur l’acceptation du non, mais aussi sur la communication, la co-régulation et le jeu. Tout cela ensemble lui permet de mieux comprendre le monde, de mieux interagir, et surtout, de ressentir la joie d’être en lien avec ses parents.

Et moi, je suis tellement reconnaissante de pouvoir aider cet enfant et ses parents, car il y a eu des moments où je ne pensais pas que ça allait être possible. Maintenant, je suis convaincue qu’on va y arriver, ensemble, car j’ai vu que les parents vont pouvoir le faire et je serai là pour les aider.

Je vous écris cela car je vois cela souvent. Des parents qui n’osent pas dire non à leur enfant autiste. Ça commence avec un petit truc, mais ça devient un truc plus grand. Mais j’écris surtout cela car vous ne réalisez peut-être pas à quel point c’est important que vous osiez dire non à votre enfant autiste. Savoir entendre et accepter le non est une des compétences les plus importantes à apprendre. Votre enfant sera accepté dans une école ou un établissement quand il pourra accepter le non. Il sera refusé s’il n’a pas cette compétence, car bien évidemment, dans un groupe d’enfants ou d’ados, on doit leur dire non de temps en temps. Et ils ne peuvent pas gérer votre enfant qui fait une crise quand ils ont 4 autres enfants, ou 30.

Je sais que ce n’est pas facile, j’ai dû apprendre à dire non à mes enfants. Même si, à l’époque, j’avais de la chance : pas encore d’iPad, ni même d’ordinateur. Mais il y avait déjà des choses à travailler… Mon fils pétait les plombs quand on changeait de route, quand je ne lui donnais pas la bonne assiette, ou quand l’émission de télévision avait déjà commencé (et que je n’avais pas été à l’heure). Pensez à ce que cela vous apportera dans le futur, si vous lui dites non maintenant. Il sera accueilli partout s’il sait entendre et accepter le non.

C’est du travail pour améliorer son futur. Que vous pouvez faire maintenant.

Évidemment, il est très important que vous appreniez à votre enfant en même temps à exprimer ses besoins, ce qu’il veut et ce qu’il ne veut pas. Il doit pouvoir s’exprimer et entendre souvent oui. Mais il doit également apprendre à accepter le non. Si vous souhaitez en savoir plus, cliquez ici

Un dernier mot là-dessus : quand vous lui dites non, et qu’il est triste, restez avec lui. Ne le laissez pas tout seul, ne l’ignorez pas. Vous pouvez juste rester là avec lui, présent, sans parler, mais avec votre présence physique et soutien émotionnel et attendre que cela se passe. S’il demande un câlin, vous pouvez lui donner un câlin. Aidez-le à gérer les émotions, mais ne lui donnez pas la chose ou l’activité pour laquelle vous lui avez dit non. Mais soyez là pour lui, pour cet apprentissage qui est, à mon avis, plus important que l’apprentissage des lettres…

La semaine prochaine, je partagerai mes expériences et quelques conseils que j’ai reçus en travaillant avec une ergothérapeute géniale. Pour que vous puissiez essayer de mettre quelques petites choses en place pendant vos vacances d’été.

Alors que commence la dernière semaine d’école, rappelez-vous combien il est précieux de ralentir, d’observer, et de vraiment se connecter — à soi, et à son enfant. Vous en faites déjà tellement… pensez aussi à prendre des moments pour vous.

P.S. Pour ne pas ajouter à votre charge, j’ai décidé de vous envoyer une lettre tous les dimanches soirs au lieu d’en envoyer une trois fois par semaine. Je sais que votre temps est limité et que vous avez déjà tellement de choses à faire et à gérer. J’espère qu’ainsi vous pourrez lire mes conseils et que cela vous aidera.

Caroline

Certification BCBA
#: 1-14-16

Certifiée par le BACB depuis 2014.
ACE provider #: IP-25-11837

Certification RDI

Certifiée consultante RDI

depuis 2022.

Adresse

47 Route de la Grange aux Moines

78460 CHOISEL

FRANCE