Résister à la tentation des résultats rapides

Un objectif simple, dès l’entrée

Nathan a 6 ans. Nathan va à l’école depuis ses 3 ans, à plein temps, avec un AVS. Dès qu’il entre, il veut ressortir. Ses parents me regardent comme pour dire : “Mais on ne peut pas le laisser sortir ?”. Je leur réponds que si, et on sort. Rapidement, je vois un objectif clair : il tire tellement ses parents que, si le père lâche sa main, il tombe. Ils n’osent pas non plus lui lâcher la main, car il se sauve. Nous allons travailler le fait qu’il marche tranquillement à côté de ses parents et qu’il tienne sur ses pieds.

Premières observations

Dans sa main, il tient deux dessins découpés. Je demande si c’est lui qui les a faits. Les parents répondent oui. Je suis impressionnée : les dessins sont beaux et bien coloriés.

Nous allons au toboggan, puis au hamac au fond du jardin. Dès qu’il est dedans, il s’agite dans tous les sens, comme s’il ne se contrôlait pas. Le hamac étant proche du sol, je demande aux parents de ne pas réagir et d’attendre qu’il se calme.

Ils m’expliquent qu’il est hyperactif et que depuis trois mois, à la demande de l’enseignante et des thérapeutes, il prend de la Ritaline — mais pas ce matin. Je leur dis que c’est très bien, car je préfère le voir sans. Je suspecte que beaucoup de son comportement est façonné par les réactions des autres, et par son incapacité à exprimer ce qu’il veut et à gérer ses émotions. Et aussitôt, je me dis que ce n’était peut-être pas adapté de ma part de dire cela, car la pédopsychiatre qui lui a prescrit est justement présente cette semaine. C’est elle qui a pris l’initiative de venir observer mon travail. Je lui demande si cela la gêne ; elle me répond que non, que nous sommes là pour apprendre.

Un enfant créatif

Avec des bâtons trouvés par terre, Nathan fait des lettres : un A, auquel il associe une pomme du jardin (apple) ; un B pour “bee !” car il en voit une voler, puis un C avec des glands en disant “candy nuts !”. Ses parents disent qu’il aime souvent jouer ainsi avec l’alphabet. Il écrit ou construit la lettre et cherche les objets qui commencent avec cette lettre dans son environnement. Clairement, cet enfant a des compétences !

Le travail avec les parents

Le lundi, nous travaillons deux fois deux heures. Le focus : améliorer l’interaction entre parents et enfant. Qu’ils ne le poursuivent plus partout, et qu’il commence à les regarder davantage. Car pour l’instant, il ne les calcule pas, il n’observe personne, et ne montre presque jamais ce qu’il veut autrement qu’en devenant hyperactif ou en fuyant. Les seules demandes claires : “shoes” (pour aller dehors), ou “car” (pour rentrer). De manière générale, il n’est pas “là” ; il chantonne sans cesse une petite mélodie avec les mots Circle ! Square ! comme si cela venait de l’iPad, mais ses parents m’assurent qu’il ne le fait presque jamais, et je les crois.

Le piège de la facilité

Mardi matin, je remarque que, dans une pièce avec des jouets, il ne veut pas du tout jouer avec nous. Il prend des cubes, mais s’isole. Avec les coloriages, il refuse qu’on touche à sa feuille. Même quand il prend des blocs, il les lâche après quelques secondes. En un rien de temps, toutes les boîtes à jouets sont retournées et il n’a joué avec rien… sauf avec le dessin. Là, il peut rester une heure entière, à dessiner et découper.

Alors je me dis : “Je peux utiliser ce qu’il aime pour le canaliser.”

Il peut dessiner tant qu’il reste assis. Dès qu’il se lève pour courir, je range les feutres. Il a très vite compris et ne se lève plus. Je lui demande ensuite de compléter un petit puzzle pour récupérer son dessin. Ses parents me disent qu’il n’en fait jamais… mais il réussit aussitôt. Il en enchaîne trois, entre deux dessins.

Je réalise alors à quel point je pourrais lui apprendre vite : lire, écrire, résoudre des puzzles… Je me dis que c’est bien, car sinon il pourrait s’ennuyer s’il ne fait que dessiner. Mon cerveau trouve tout de suite les excuses pour ce que je suis en train de mettre en place. C’est tellement facile... Mais je sais que cela ne servirait à rien. Car le vrai problème, c’est qu’il n’arrive pas à se connecter aux autres. Il n’apprendrait pas à interagir, à observer, à se synchroniser. Il a besoin d’apprendre la co-régulation, pour ensuite développer son auto-régulation.

Et pourtant, c’est tentant : il a l’air calme et compétent à table. Mais dès qu’il a un peu de liberté, c’est l’inverse : il se met en danger, n’écoute rien, et devient un vrai Tasmanian devil.

La transformation en quelques jours

Alors je dis aux parents : “Nous savons maintenant qu’il peut apprendre vite. Mais nous n’allons pas suivre cette voie. La base, c’est le social. C’est beaucoup plus difficile, mais bien plus utile sur le long terme.” Ils sont d’accord. Le reste de la semaine, nous abandonnons la salle de jeux et travaillons des jeux sociaux : faire semblant de dormir, se cacher sous une couverture, tomber ensemble, marcher ensemble, chanter…

Dès la troisième journée, les résultats apparaissent : il regarde davantage ses parents, rit avec eux, se laisse bercer et devient tranquille. Il suit leurs mouvements, réclame différents jeux comme marcher sur leurs pieds, faire semblant de dormir, tomber, jouer au cheval, ainsi que des câlins. Il nous demande avec enthousiasme de chanter Row Row Row Your Boat quand il est dans le hamac, et on ne l’entend pratiquement plus chantonner seul. Pendant qu’on chante, il nous regarde tout le temps et, cerise sur le gâteau, il commence à chanter avec nous ! Un vrai changement.

Résister à la tentation des résultats rapides

Ses parents, touchés, ont accepté que je montre les vidéos pendant ma formation "jouer et communiquer" qui commence mi-septembre. Je montrerai aussi le travail à table, pour illustrer la tentation. Lucas, qui observait, m’a dit : “Je t’ai bien vu faire et je me suis dit : Voilà, elle sait le faire tellement bien, l’enfant s’adapte immédiatement… voyons ce qu’elle va choisir.” Il a vu que j’ai su m’évaluer, résister à la tentation des résultats rapides, et inhiber cette envie de pousser l’enfant dans une voie trop facile.

Comme toujours, je dois parfois me rappeler moi-même ce que j’enseigne déjà. Mais c’est cela aussi, ce métier : ajuster, réfléchir, se remettre en question.

Et Nathan, comme les autres enfants, était épuisé après les séances. Car au lieu de faire “n’importe quoi”, il devait réfléchir, changer ses automatismes. C’est crevant… mais c’est aussi pour cela qu’il est devenu plus calme, petit à petit.

Les compétences sociales, un socle

Les choses qui comptent vraiment dans la vie ne s’acquièrent pas vite, ni sans effort. Notre société aime nous faire croire, par le marketing et les promesses faciles, qu’on peut tout obtenir rapidement, sans investissement personnel. Mais ce n’est pas la vérité. Pour développer de véritables compétences, dont celles pour construire des relations sociales, essentielles à la vie — il faut du temps, de la persévérance, et accepter les longs plateaux où rien ne semble bouger. C’est dans cet engagement patient que se trouvent les vrais progrès, et c’est cela que j’essaie de transmettre.

Et c’est ce chemin, parfois exigeant mais tellement riche, que je vous propose de parcourir ensemble dans la formation.

Les compétences sociales sont le socle sur lequel se construisent tous les autres apprentissages — langage, imitation, jeu.

C’est une erreur de penser qu’il faut d’abord apprendre à parler ou à imiter a table, et que les compétences sociales viendraient ensuite. Ce n’est pas le cas : certains enfants parlent sans vraiment communiquer, d’autres savent imiter sans aimer — ni pouvoir — jouer avec les autres.

Regardez un enfant de 18 mois : il est profondément social, il communique, même si les mots lui manquent encore.

La bonne nouvelle : on peut enseigner aux enfants autistes ces compétences sociales, sans renforçateurs extrinsèques ni guidance physique. Et dans cette formation, vous apprendrez comment !

La formation

La formation se fait en 16 sessions le vendredi soir de 18h à 20h en direct en ligne, réparties dans l’année scolaire pour vous laisser du temps pour appliquer ce que vous apprenez. Si vous ratez une session vous pouvez regarder le replay. Inscrivez-vous avant le démarrage mi-septembre.

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